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Christ Sauveur

7 juillet 2024, Cathédrale Saint-Louis de La Rochelle

 

Je vous propose de nous arrêter un peu sur cette 2e lettre aux Corinthiens qui est un
véritable trésor spirituel. Certaines phrases sont des pépites.
Dieu qui dit à Paul : « ma puissance donne toute sa mesure dans la faiblesse », ou
encore Paul qui en conclut : « lorsque je suis faible, c’est alors que je suis fort », « je
mettrai ma fierté dans mes faiblesses ».
Il n’y a pas plus contre-intuitif. Comment être fiers de nos faiblesses ou heureux de
nos vulnérabilités ? Et pourtant on sent bien qu’il y a là une vérité puissante.
Et cette vérité nous percute d’autant plus aujourd’hui, que nous célébrons le baptême
de Joseph. Vous l’avez vu, Joseph porte, pour reprendre l’expression de saint Paul,
« une écharde » dans « sa chair », en l’occurrence une trisomie 21. Aux yeux du
monde, question faiblesse, on est sur du haut niveau.
Sachant toutes les difficultés de cette maladie, peut-on décemment dire que la
puissance de Dieu pourrait s’y déployer ? C’est bien ce que dit saint Paul.
Sans vouloir être désagréable avec toi Joseph, ton écharde, tout le monde la voit.
Mais tu apprendras que toutes les échardes ne se voient pas. La plupart sont très
discrètes et nous en portons tous, plus ou moins douloureuses. L’écharde de saint
Paul ne se voyait pas et pourtant lui aussi était malade. On ne sait pas exactement ce
qu’il avait. L’hypothèse la plus probable est qu’il était épileptique.
Mais peu importe. Il nous suffit de savoir que Paul souffrait dans sa chair et dans sa
tête peut-être.
Soyons clairs : Paul n’était pas ravi d’être malade. Il dit avoir beaucoup prié pour
que Dieu le délivre de sa maladie.
Mais finalement il a compris ceci : « ma grâce te suffit ».
Paul fait l’expérience que, même malade, la grâce de Dieu suffit. Mieux ! Sa maladie
est le terreau de la grâce de Dieu. C’est parce qu’il y a un besoin et un désir de grâce,
que la grâce peut abonder.
Ce paradoxe entre faiblesse et force, entre souffrance et grâce, n’est pas si difficile à
comprendre. C’est bien parce que Paul est affaibli qu’il peut recevoir la puissance de
Dieu. C’est bien parce que je suis malade que je peux recevoir la puissance de la
guérison.

Vous allez me dire : autant ne pas être malade et on n’aura pas besoin de la puissance
de Dieu. Faux ! Archi faux.
Le tout est de comprendre que mon humanité est malade par nature, tant qu’elle n’est
pas divinisée, sauvée par Dieu. Donc j’ai, par nature, besoin de la grâce de Dieu,
mais elle ne se déploiera que si j’ai conscience de mon besoin de grâce et si je la
désire.
Paul nous explique qu’être malade est une bonne nouvelle car ça l’empêche de se
surestimer. On le comprend. Toute écharde nous empêche de nous surestimer. Toute
souffrance nous ramène à la réalité de ce que nous sommes et ainsi, nous évite de
nous prendre pour Dieu, ce qui, rappelez-vous le récit de la Genèse, est la source de
tous les maux.
Attention, Paul ne nous dit pas de rechercher la souffrance. Il dit que, de la souffrance
qu’il n’a ni choisie ni recherchée, peut naître un grand bien qu’est la conscience de
sa vocation divine. Or cela est tellement grand que Paul décide d’y mettre sa fierté.
Nous devrions tous mettre notre fierté dans notre vocation divine. Ce n’est pas de
l’orgueil, au contraire, puisqu’ainsi nous reconnaissons notre besoin de Dieu.
Paul nous invite à reconnaître notre petitesse, notre besoin de Dieu, pour voir sa grâce
agir en nous et y reconnaître notre force. Vous comprenez ? Entre nous et Dieu, notre
désir de force, d’autonomie, notre ego, notre orgueil, fonctionnent comme des
remparts à a grâce. Donc les souffrances que nous portons, les humiliations que nous
subissons nous évitent de dresser des remparts entre Dieu et nous. En cela, nos
souffrances ne sont pas vaines.
Ça me fait penser à ces personnes qui, devant quelque chose de beau, sortent tout de
suite leur téléphone pour filmer. Ils ne contemplent plus le beau, mais l’écran, qui
n’est qu’une image du beau. C’est comme quand nous contemplons notre ego qui se
dresse entre Dieu et nous. Nous contemplons l’image de Dieu que nous sommes.
Mais si nous nous abaissons un peu, si nous baissons notre égo, notre téléphone, nous
verrons le beau, nous verrons Dieu et sa grâce agissante.
Joseph va recevoir la grâce du baptême, une filiation divine. Que la maladie dont il
souffre permette au Christ de faire d’autant plus sa demeure en lui. Et que la maladie
de Joseph devienne pour nous tous une chance de voir la grâce de Dieu à l’œuvre en
ce monde. Amen.
P. Louis Chasseriau

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