Chers frères et sœurs,
Nous venons tout juste de célébrer Noël, puis Sainte Marie – Mère de Dieu le 1er
janvier, et nous voilà à l’Épiphanie. C’est magnifique de voir comment ces jours que
nous vivons sont un condensé du mystère de l’Incarnation.
Soyons honnêtes, ces jours-ci sont aussi un condensé culinaire… mais c’est d’abord
un condensé liturgique et théologique.
Avec le Baptême du Seigneur que nous célébrerons demain, ce sera demain la fin du
temps liturgique de Noël. Et pendant tout ce temps de Noël, nous sommes entrés
dans le mystère de l’Incarnation.
Je ne sais pas si vous avez remarqué que nous avons progressé dans le mystère de
l’Incarnation comme par cercles concentriques.
A Noël, nous sommes entrés dans le cœur du mystère avec la naissance de Jésus.
Et puis nous avons contemplé Jésus entouré de Marie et Joseph au jour de la Sainte
Famille.
Ensuite, avec la solennité de Sainte Marie – Mère de Dieu, le 1er janvier, nous avons
élargi l’horizon. Jésus est entré dans un peuple, le peuple juif. Mais seuls les bergers,
eux qui étaient en éveil, sont venus le reconnaître comme Messie.
Et aujourd’hui, nous embrassons le cercle le plus large avec les mages venus
d’Orient. La bonne nouvelle de l’Incarnation se répand aujourd’hui jusqu’aux
extrémités de la terre. Ce Messie dont la naissance a été annoncée à une famille, qui
était attendu par un peuple, s’est révélé être le Messie de tous les peuples, de tous les
hommes, bien au-delà des frontières d’Israël.
Jésus, la famille, le peuple et aujourd’hui, le monde.
Jésus :
1/ est né dans une famille,
2/ pour être reconnu et annoncé par un peuple,
3/ pour le Salut de tous les hommes.
Or nous, depuis Noël, c’est comme si nous avions contemplé cette Incarnation de
l’extérieur, ou plutôt, à partir de cercles qui n’étaient pas les nôtres.
À Noël, Jésus est né dans une famille, mais ce n’était pas notre famille.
Il est né pour être reconnu et annoncé par un peuple, mais ce n’était pas notre peuple.
Mais il est venu pour le Salut de tous les hommes, et nous sommes ces hommes.
L’Épiphanie, c’est la fête de l’Incarnation qui nous donne le rôle principal ! Dans la
crèche, nous sommes les Mages. Enfin, nous pouvons regarder la Nativité avec ce
que nous sommes vraiment : des personnes de l’extérieur, comme ces mages venus
d’Orient. Dans le théâtre de la crèche, nous sommes les mages !
D’ailleurs, la tradition ne s’y est pas trompée. Elle qui a fait de ces mages des rois,
elle nous invite à nous mettre une couronne quand nous tombons sur la fève.
L’Épiphanie nous invite à nous identifier aux mages, à ces hommes du dernier cercle
qui rejoignent enfin le cœur du mystère.
Vous me direz : si s’identifier aux mages consiste à se mettre une couronne sur la
tête, c’est un peu court. Certes.
Alors si nous sommes les Mages, à quoi nous invitent-ils vraiment ? Que nous
montrent-ils ? Que nous disent-ils sur ce que doit être notre vie maintenant que Dieu
est entré dans le monde ?
Les mages n’étaient pas des rois mais des prêtres, des prêtres de l’ancienne Babylone
et de la Perse, à l’Orient. Ils étaient des prêtres païens et savants. Ils savaient lire le
ciel et les astres. Et ils étaient probablement importants : regardez les cadeaux
précieux qu’ils amènent et qui valent une fortune.
Autrement dit, ces hommes ont tout ce qu’il faut : une situation, une reconnaissance,
des richesses. Ils n’ont pas besoin de Jésus. A priori ils n’ont rien à attendre.
Et pourtant, ils voient l’étoile, ils comprennent que le roi des juifs et né, ils prennent
leurs chameaux pour venir se prosterner. L’Évangile nous dit qu’ils :
1/ se réjouissent,
2/ entrent,
3/ se prosternent
4/ et offrent.
Ça ne vous dit rien ?
C’est exactement ce que chacun de nous vit chaque dimanche matin ! Nous nous
réveillons, et c’est dimanche. Nous savons nous aussi qu’une étoile ou un son de
cloche va nous guider jusqu’à Jésus qui vient nous rejoindre. Alors nous nous
réjouissons. Nous prenons le chameau, ou la voiture, jusqu’à l’église et nous entrons.
Nous y rencontrons le Christ et nous nous prosternons devant lui en lui offrant notre
vie.
Puis, comme eux, nous repartons par un autre chemin, le chemin d’une vie nouvelle.
Nous sommes les mages ! Le mouvement que les mages nous montrent est le
mouvement de la vie chrétienne !
Être chrétien s’est se bouger parce qu’on se réjouit, c’est être mis en chemin par la
joie. Puis c’est entrer et découvrir que cette joie est une personne qui entre en relation
avec moi. Cette joie c’est Dieu qui se manifeste. C’est d’ailleurs le sens du mot
Épiphanie : έπιφάνεια, la manifestation.
Cette joie, c’est Dieu qui s’offre.
Face à cela, nous nous prosternons. Ce n’est pas un rabaissement… c’est une
offrande en retour. Nous sommes peu de choses, mais ce que nous sommes, nous lui
offrons aussi, par amour. Il nous offre sa vie, nous lui offrons la nôtre. Et lui
l’accueille et la fait grandir jusqu’à la diviniser.
Vous l’avez compris frères et sœurs, le temps de Noël s’achèvera demain. Il est temps
de ranger nos santons dans leurs boîtes en carton, et de vivre comme les mages, de
vivre en chrétiens.
Désormais, il nous faut quitter la contemplation de la crèche et nous réjouir, nous
mettre en chemin et ne pas cesser de nous offrir comme lui s’offre dans l’Eucharistie.
Amen