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Christ Sauveur

Dimanche de la Pentecôte

Il s’en est passé des choses en quelques jours à Jérusalem ! Jésus est mort, il est
ressuscité, il est monté au ciel. Et 10 jours après, voilà la fête de Shavouot, la
Pentecôte juive qui commémore le don de la loi au Sinaï.
Essayer d’imaginer à quoi pouvait ressembler Jérusalem. Tous les juifs, de toutes les
nationalités, viennent à Jérusalem fêter Shavouot. Philon d’Alexandrie écrit que
« d’innombrables foules provenant d’innombrables villes viennent, soit par la terre,
soit par la mer, de l’est, de l’ouest, du nord ou du sud. » L’équivalent aujourd’hui
d’un évènement pareil, ça pourrait être les JMJ. Mais là, ce sont toutes les générations
qui viennent.
Donc il faut bien comprendre que dans ce contexte, la résurrection et l’ascension de
Jésus qui venaient de se dérouler, étaient encore des évènements confidentiels. Très
peu en ont été témoins, peu ont entendu parler de ce qui s’était passé… Et bien peu
pouvaient imaginer ce qui allait se passer en ce jour de Shavouot.
Mais saint Luc est un bon narrateur : il nous prépare, nous, lecteurs, à l’évènement
qui arrive. Il fait un vrai teasing en utilisant des références de l’Ancien Testament
dont deux sont assez évidentes.
D’abord, il parle d’un bruit venu du ciel et d’un violent coup de vent. Là il fait
référence au Sinaï, au moment du don de la Loi que précisément ces juifs viennent
commémorer à Jérusalem. Luc nous dit qu’un nouveau Sinaï va se produire, un
nouveau don. Autrefois Dieu avait donné la loi à son peuple pour le libérer de
l’esclavage, Dieu va maintenant lui donner l’Esprit Saint pour le libérer
définitivement de toute entrave humaine.
Ensuite, il y a cette fameuse affaire de langues qui nous renvoie à l’épisode de
Babel. Vous vous souvenez de l’épisode de la tour de Babel, nous l’avons entendu
hier à la messe de la veille au soir.
Avant Babel, tous les hommes parlaient une seule et même langue. Le rêve ! Plus
besoin de cours d’anglais, d’espagnol ou d’allemand, au collège. Les hommes
étaient unis par une langue unique. Mais qui dit langue unique dit culture unique,
pensée unique, et même péché unique. Les hommes se sont lancés dans un projet

unique, mais funeste : construire une immense tour pour toucher les cieux, pour
toucher Dieu.
Alors Dieu a rendu un grand service à l’humanité : il a multiplié les langues, donc
les façons de penser, donc les cultures. Il a enrichi l’humanité en la rendant diverse.
Il nous a permis d’expérimenter que le bonheur passe par l’altérité.
Voilà ce à quoi Luc nous renvoie pour nous situer à Jérusalem, en ce jour de
Shavouot, et mieux comprendre ce qu’il va s’y passer. Des hommes de toutes
langues sont là, c’est le monde d’après Babel. Il y a toutes les cultures, mais une
seule bonne nouvelle à annoncer à tous : la bonne nouvelle de la mort et de la
résurrection du Fils de Dieu par amour pour chacun de nous.
Et là, le miracle de la Pentecôte se produit ! Voilà, nous y sommes. L’Esprit Sint
est envoyé, comme il l’avait promis. Et c’est le miracle.
Mais quel miracle exactement ? C’est quoi le miracle de la Pentecôte ?
Ce miracle n’est pas le retour à une langue unique. On ne revient pas à Babel.
Je crois que ce miracle n’est pas non plus que les apôtres se soient mis à parler des
langues étrangères sans les avoir apprises. Certes saint Luc nous dit que c’est le
cas, mais il passe très vite là-dessus.
Le miracle de la Pentecôte sur lequel saint Luc insiste vraiment est que chacun
entend la Bonne Nouvelle dans sa propre langue. C’est bien différent.
Le texte dit bien que les Galiléens se sont mis à parler en d’autres langues. Mais le
texte insiste surtout pour dire que chacun entendait sa propre langue. Vous allez
dire que je chipote… mais non, c’est très important.

Sinon, on risque de croire que l’Esprit Saint c’est Dieu qui nous donne des super-
pouvoirs. Non, l’Esprit Saint, ce jour-là, a donné à chacun de comprendre la bonne

nouvelle dans son langage, dans sa culture. L’important c’est que la bonne nouvelle
réunit l’humanité dans sa diversité. Vous comprenez la différence ? L’heureuse
diversité d’après Babel est maintenue.
Le miracle de la Pentecôte est celui de la compréhension des merveilles de Dieu
par tous les hommes, dans leurs différences. Le miracle n’est pas que les disciples
aient pu annoncer la Bonne Nouvelle, mais que tous aient pu la comprendre.
Avec l’Esprit Saint, le christianisme n’est plus affaire d’une culture, d’une région,
d’une époque. C’est la bonne nouvelle de l’amour de Dieu pour tout être humain.

C’est beau, non ? L’Esprit Saint, c’est comme l’eau qui vient du ciel. Vous savez,
quand il pleut, c’est la même eau partout, mais elle fait pousser ici du blé, ici un
cyprès, là un pin parasol. C’est comme l’Esprit : l’eau est la même pour tous, mais
pour chacun les fruits sont différents. Comme l’Esprit, l’eau ne se transforme pas
en tombant ici ou là, mais selon la constitution des êtres qui la reçoivent, elle
produit en chacun ce qui lui convient.
L’Esprit fait éclore nos dons, pour que nous annoncions à chacun, selon ce qu’il
est, la bonne nouvelle de la mort et de la résurrection de Jésus.
Il n’y a personne à La Rochelle, dans ce diocèse, dans ce monde, à qui nous ne
serons capables de dire l’Évangile avec ses mots à lui, avec sa culture à lui, avec sa
manière de comprendre le monde.
L’Esprit Saint nous invite à sortir de notre jargon catho, à sortir de nos cadres
parfois un peu étroits.
L’Esprit Saint nous invite aussi à ne pas attendre que les non chrétiens nous
rejoignent, mais à les rejoindre avec leur langage et pas le nôtre. Il nous invite non
pas à vouloir faire entrer les autres chez nous, mais à sortir les rencontrer chez eux.
L’Esprit Saint nous donne la capacité de parler la culture de l’autre.
Ça peut faire peur. Mais n’ayons pas peur. L’Esprit est avec nous. Amen.
P. Louis Chasseriau

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