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Christ Sauveur

28 août 2022, églises du Sacré-Cœur et Sainte-Jeanne-d’Arc

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Chers Frères et Sœurs,
Ça y est, j’ai enfin compris ! Deux ans que je prenais le problème dans tous les sens,
et deux ans que je ne trouvais pas la réponse. Mais avec l’Évangile d’aujourd’hui,
j’ai enfin compris.
Depuis deux ans, je vois l’église à moitié vide à la procession d’entrée. Les places
de devant sont occupées et au fond c’est vide. Mais un quart d’heure après, le fond
est rempli aussi. Le phénomène est étrange, non ?
Moi, je n’osai pas croire qu’on puisse arriver en retard à la messe juste parce que
c’est compliqué de se lever le dimanche. Et j’avais raison. En lisant l’Évangile, j’ai
compris que le fond de cette église est rempli de chrétiens qui ne veulent pas se sentir
obligés de prendre les premiers rangs comme des pharisiens !
Et oui, vous avez entendu… 3e fois que Jésus va manger chez les pharisiens, et 3e
fois que le déjeuner se passe mal. C’est toujours compliqué avec les pharisiens. D’un
côté, ils sont très estimables : ce sont des hommes qui prennent la foi au sérieux, qui
ont un vrai désir de conversion, et Jésus les estime vraiment pour ça.
Mais quand il débat avec eux, ça finit mal parce que les pharisiens ont un tel idéal
religieux qu’ils finissent par être méprisants avec ceux qui ne sont pas au même
niveau qu’eux.
Et c’est le problème qui revient encore sur la table. En toute bonne conscience, les
pharisiens qui arrivent à la noce s’attribuent les premières places, qui sont les places
d’honneur (contrairement à nos églises… pardonnez-moi mais je plaisantais
évidemment : les places de devant ne sont plus des places d’honneur depuis
longtemps ! Le but est que chacun se sente bien là où il est : si vous vous sentez bien
devant c’est bien et si vous vous sentez bien au fond, c’est très bien aussi).
Mais dans la société juive, les premières places sont les places d’honneur et elles
semblent acquises aux pharisiens.
Remarquez que Jésus ne discute pas de savoir s’ils méritent ou non ces premières
places. Peut-être qu’ils les méritent. On n’en sait rien. Non, Jésus pointe autre chose.
Il pointe un danger dans lequel les pharisiens tombent, et dans lequel nous tombons
souvent nous aussi. C’est le danger de l’orgueil.

L’orgueil, ça consiste à se considérer supérieur aux autres, ou à certains autres,
parfois jusqu’à les mépriser. Comme avec les pharisiens, la question n’est pas de
savoir si cette supériorité est réelle ou non. Le problème c’est quand nos talents, qui
devraient être des motifs d’action de grâce, deviennent des motifs d’autosatisfaction,
d’arrogance, de prétention de toujours savoir, de confiance absolue en son propre
jugement, d’esprit de contradiction, de volonté d’enseigner voire de commander.
Et si Jésus s’en mêle, c’est que l’orgueil n’est pas un simple travers humain ; c’est
une maladie spirituelle. C’est une maladie qui nous éloigne de Dieu, doucement mais
surement.
Comme pour toute maladie, il faut savoir la diagnostiquer puis la traiter. Mais
rassurez-vous tout de suite, il y a un traitement.
Le premier symptôme de l’orgueil, c’est notre absence à Dieu. L’orgueilleux sait très
bien se passer de Dieu.
Dit à l’inverse, être présent à Dieu, vivre avec et en Dieu, c’est faire preuve
d’humilité. Jésus nous appelle aujourd’hui à l’humilité.
La racine latine d’humilité est la même que celle d’humus. La personne humble sait
qu’elle vient de l’humus, de la terre, qu’elle est poussière et retournera à la poussière.
L’humble est celui qui aime se tenir en présence de Dieu parce qu’il sait que c’est
Dieu qui lui donne tout.
Quand on est humble, on apprend à reconnaître en permanence la présence de Dieu,
la main de Dieu, dans nos vies, dans les talents qui nous sont donnés comme dans les
difficultés auxquelles nous sommes confrontées. Être humble c’est apprendre à
reconnaître une présence de Dieu qui nous est révélée au travers de la conduite qu’il
fait de nos existences.
La véritable humilité c’est la reconnaissance de cet état, que quelles que soient les
situations auxquelles nous pouvons être confrontées, bonnes ou mauvaises, il y a un
dessein de Dieu qui s’exprime au travers d’elles. Elles entrent dans le grand dessein
de Dieu pour nous et pour le monde.
Être humble, c’est vivre dans une conscience que Dieu a un dessein pour moi et pour
le monde, qu’il nous y mène, qu’il nous mène vers l’accomplissement des temps,
vers son retour, et que tout ce que je vis y participe, même les épreuves.

Il faut acquérir cette habitude de vivre en présence de Dieu pour devenir ces
personnes humbles que Jésus souhaite que nous soyons.
Et ça fait du bien d’être humble ! Enfin, pour ce que j’en ai tenté… et pas toujours
réussi, je l’avoue volontiers. Mais même essayer, ça fait du bien ! Ça permet de voir
la grandeur de Dieu, la présence de Dieu dans le monde, comprendre et voir qu’il est
vraiment à l’œuvre, qu’il agit dans le cours de ma vie. Sans humilité, je suis incapable
de voir combien Dieu est grand, combien il est bon. Parce que l’orgueil vient
s’intercaler comme un filtre opaque entre Dieu en moi.
Frères et sœurs, voilà pour le diagnostic. Chacun pourra s’interroger sur son degré
de contamination à l’orgueil.
Alors le traitement maintenant. Le meilleur docteur en la matière c’est Dorothée de
Gaza, un Père du désert du VIe siècle. Son ordonnance était la suivante : charité et
prière.
Pour guérir de l’orgueil, pour grandir en humilité, il faut pratiquer la charité. La
charité supprime l’orgueil. Ça nous remet à notre place.
C’est exactement ce à quoi Jésus invite les pharisiens. Quand il constate leur manque
d’humilité, que leur prescrit-il ? « Quand tu donnes un dîner (…) invite des
pauvres ». Voilà le premier remède : la charité concrète, exigeante, une charité qui
nous remet à notre juste place. La charité supprime l’orgueil.
Et puis la prière. En pratiquant la charité, il faut prier pour rendre grâce à Dieu.
Dorothée de Gaza écrit : « Celui qui prie Dieu sans cesse, quelque bonne œuvre qu’il
lui soit donné d’accomplir, il en connaît la source et il ne peut en concevoir de
l’orgueil ni l’attribuer à ses propres forces. C’est à Dieu qu’il attribue toute bonne
œuvre, et il ne cesse de le remercier et de l’invoquer, craignant que la perte d’un tel
secours ne laisse apparaître sa faiblesse et son impuissance à lui ».
Frères et Sœurs, ça n’a jamais été aussi agréable de prendre un traitement, alors
n’attendons pas pour nous soigner. Soyons les humbles que Jésus souhaite, et nous
verrons vraiment Dieu à l’œuvre dans nos vies.
Amen.

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