30 mars 2024, Cathédrale Saint-Louis de La Rochelle
Vous admettrez qu’il ne faut pas moins que ces neuf lectures pour méditer les
merveilles que Dieu, depuis les origines, a réalisées pour nous. Neuf lectures pour
entendre toute l’histoire du Salut se déployer, depuis la Création des premiers jours,
jusqu’à la recréation de notre humanité au matin de Pâques.
Imaginez-vous au matin de Pâques, non pas demain matin à La Rochelle, mais il y
a 2000 ans à Jérusalem. Imaginez-vous, c’est l’aurore d’un jour unique. Vous ne le
savez pas encore, mais Dieu vient d’accomplir son projet d’amour pour l’humanité.
Vous vous rendez au tombeau de celui qu’on a crucifié, et c’est vous qui découvrez
ce tombeau vide. Comment réagissez-vous ? Que faites-vous ? Vous sautez de joie,
vous appelez vos amis, vous avez peur, vous fuyez ?
Marie-Madeleine, Marie et Salomé, elles, ont peur. C’est la peur qui les guide du
début à la fin. D’abord, elles ont peur de ne pas pouvoir rouler la pierre du
tombeau. Ensuite, le tombeau étant ouvert, elles entrent et sont effrayées par l’ange.
Enfin, l’Évangile nous apprend qu’« elles ne dirent rien à personne, car elles
avaient peur » (v.8).
Franchement, c’est un peu dommage, non ? Elles sont les trois premiers témoins du
plus grand évènement de l’histoire, l’évènement qui change tout, et plutôt que
d’exploser de joie, elles ont peur.
C’est difficile de leur en vouloir à Marie-Madeleine, Marie et Salomé. Ce ne sont
ni les premières ni les dernières à être guidées par la peur. Depuis le début de
l’histoire l’être humain a peur, à commencer par Adam. Dieu le cherche mais il se
cache car il a peur de son Créateur : « j’ai entendu ta voix dans le jardin, j’ai pris
peur car j’étais nu et je me suis caché » (Gn 3,9-10).
Depuis Adam, la peur a continué d’imposer sa loi. Caïn a eu peur de son frère Abel
et l’a tué. Abraham a eu peur que Dieu lui prenne sa paternité. Joseph a été victime
de la peur de ses frères. Pharaon a eu peur du peuple Hébreu, lequel a eu peur de la
faim et de la soif au désert, etc, etc. Et aujourd’hui rien n’a changé, la peur guide
notre monde : peur de manquer de temps, d’argent, d’amour, peur du jugement,
peur de l’autre, peur de la fin de vie… et par-dessus tout, peur de la mort.
Nous vivons dans la peur. Or la peur engendre la jalousie, la colère, l’orgueil,
l’envie, la violence.
Et pourtant, avez-vous bien entendu les premiers mots qui sortent de la tombe ? Au
matin de la résurrection, au moment où l’histoire bascule parce que la mort est
tenue en échec, quels sont les premiers mots que l’humanité entend ? « Ne soyez
pas effrayées ! ». L’ange dit : n’ayez plus peur, parce qu’il est ressuscité.
Frères et sœurs, la résurrection que nous proclamons en cette nuit doit faire stopper
toute peur ! Voilà le message qui sort de cette tombe : n’ayons plus peur, parce que
la mort vient de perdre le match, elle vient d’être mise K.O. par la vie de Dieu.
La plus grande de nos peurs est vaincue. Alors de quoi avoir peur désormais ?
Que craindre, puisque quoi qu’il arrive, la vie a vaincu ? Désormais, tout ce que
nous aurons à vivre de douloureux ne sera plus qu’un passage qui devra s’effacer
devant la vie de Dieu. Alors nous pouvons vraiment vivre toutes nos épreuves avec
une paix profonde. Et si nous décidons d’accueillir vraiment cette bonne nouvelle,
ça changera tout ! Nous serons les plus libres de tous les hommes !
Sommes-nous prêts à vraiment accueillir cette réalité de la résurrection ? Sommes-
nous vraiment prêts à laisser Dieu être le vainqueur de nos peurs et à devenir
vraiment libres ? Sommes-nous prêts à nous abandonner complètement à cette paix
de Dieu, à ne plus être les esclaves du mal, de la souffrance et de la mort ?
Sommes-nous prêts à croire que nous sommes aimés à ce point par Celui qui a
vaincu la mort et nous veut libres ?
Frères et sœurs, si nous répondons tous un grand oui, attendez-vous à ce que le
monde change. Parce que l’absence de peur engendre la paix, et la paix engendre la
justice et l’amour.
Si nous répondons tous un grand oui, la peur perdra son emprise sur ce monde et
nous serons vraiment libres parce que nous vivrons dans la paix. Ce ne sera pas un
monde de bisounours, mais un monde de justice et de paix. Et vraiment c’est
possible. Il suffit que chacun accueille et répande autour de lui la bonne nouvelle de
la résurrection. Amen. P. Louis Chasseriau