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Christ Sauveur

18 mai 2023, Sacré-Cœur et Sainte-Jeanne d’Arc, La Rochelle

 

D’habitude, à chaque fête chrétienne, l’Évangile nous livre le récit de ce que nous
célébrons. À Noël, l’évangile nous raconte la nativité, à Pâques, l’évangile nous
raconte le matin de la résurrection, etc. Mais aujourd’hui, non. Matthieu, dans son
Évangile, ne parle pas de l’Ascension. C’est curieux pour un évènement aussi
important !
C’est Luc, dans les Actes des Apôtres, en 1e lecture, qui raconte ce qui s’est passé.
Nous venons de lire la toute fin de l’Évangile de Matthieu. Et plutôt que de terminer
l’histoire avec Jésus qui part, il préfère finir son récit avec Jésus qui dit : « Et moi, je
suis avec vous tous les jours jusqu’à la fin du monde ».
Frères et sœurs, l’Ascension nous met face à cette vérité paradoxale : Jésus n’est plus
avec nous sur cette terre, et pourtant il demeure présent.
Il est important de dire que Jésus est retourné auprès du Père, comme il l’avait
annoncé. Saint Paul, dans ses épîtres, l’évoque très souvent. Mais il est au moins
aussi important de dire que Jésus demeure pour autant présent avec nous, avec
chacun de nous, chaque jour. C’est le mystère de la présence-absence de Jésus que
nous contemplons aujourd’hui.
D’abord Jésus retourne auprès du Père, comme s’il nous quittait.
Certains pourraient dire : « tout ça pour ça ! Il repart comme il est venu. » Et bien
non justement. Jésus ne repart pas comme il est venu ! Entre temps, il y a quand
même eu l’incarnation !
Dieu est entré dans notre histoire humaine, il est entré dans l’humanité, totalement.
À l’Ascension, Jésus repart mais ce n’est pas le rétablissement de l’état initial, avec
les hommes d’un côté et Dieu de l’autre. Jésus n’est pas un voyageur venu nous
informer d’une bonne nouvelle pour ensuite repartir chez lui. Non, Jésus ne repart
pas comme il est venu, parce qu’il emporte son humanité avec lui.
Jésus monte auprès du Père avec son humanité, avec notre humanité, avec tout ce qui
a fait son histoire sur cette terre, avec toute cette humanité glorifiée.
Dit autrement, à l’Ascension, notre humanité fait son entrée dans la Trinité ; elle
entre en Dieu.

Voilà une partie du mystère que nous célébrons aujourd’hui. L’Ascension, c’est
l’entrée irréversible de l’humanité rachetée dans la gloire de Dieu.
« Dieu s’est fait homme, pour que l’homme devienne Dieu ».
Avant, il y avait deux mondes. L’un divin, l’autre humain. Et Dieu faisait des
alliances avec les hommes.
Puis Dieu est venu chez nous, et aujourd’hui, il nous emmène chez lui. Mieux, il fait
de son « chez lui », un « chez nous », ce qui n’est pas tout à fait pareil.
La Trinité ne devient pas comme les 3 mousquetaires, où il y aurait le Père, le Fils,
l’Esprit… et l’humanité. La Trinité demeure Trinité parce que Jésus demeure un,
mais il est désormais à la fois Dieu et homme.
Aujourd’hui Dieu nous invite chez lui et sa maison devient notre maison.
Pour autant, il y a aussi cette deuxième partie du mystère : Jésus part mais reste
présent avec nous tous les jours jusqu’à la fin du monde. Cette présence n’est certes
plus de la même nature, mais elle n’est pas moins réelle !
Cette absence physique du Christ ressuscité ne signifie pas que le lien entre Jésus et
ses Apôtres soit rompu, que tout ce qu’ils ont vécu avec lui disparait. Les disciples
d’Emmaüs, tout tristes, pensaient aussi que tout était fini. Mais ce n’était pas le
cas !
Les Apôtres, comme nous aujourd’hui, sont appelés à découvrir que la présence du
Christ auprès de son Père – dans la gloire – ne signifie pas une absence auprès de
nous, mais une nouvelle forme de présence, par son Esprit qu’il va nous donner à la
Pentecôte.
Quelle espérance ! Quelle assurance ! Il part mais n’abandonne pas. Il ne dit pas «
maintenant c’est à vous de vous débrouiller ». Il nous promet de ne jamais nous
abandonner.
Combien de fois, dans combien de situations ne voyons-nous pas plus l’absence de
Dieu que sa présence : « Seigneur où es-tu ? Que fais-tu pour moi ? ». Chaque fois
que nous sommes dans l’épreuve, devant la maladie, le deuil, devant la peur qui
peut nous envahir et nous paralyser, devant les inquiétudes si fortes pour demain…
Où est la promesse du Seigneur ? Comment nous accompagne-t-il ?
Et bien peut-être que c’est justement dans ce qui semble être dans le creux de nos
vies qu’il vient nous rejoindre et nous prendre par la main, nous redonner courage,
espoir, confiance. La promesse du Seigneur n’est pas une parole en l’air, mais la

certitude que quoi qu’il arrive, il marche avec nous, il nous relève si nous acceptons
de saisir la main qu’il nous tend.
Voilà le mystère : l’absence qui devient présence.
Frères et Sœurs, nous sommes faits pour quitter ce monde, parce qu’avec l’Ascension
de Jésus, notre nouveau chez nous c’est le Royaume de Dieu. Mais chrétiens, nous
sommes encore dans ce monde, et nous pérégrinons avec le Christ à nos côtés. Voilà
les deux faces d’un même mystère : nous sommes en pèlerinage sur cette terre et
notre cité se trouve déjà dans les cieux.
Amen

Par le père Louis Chasseriau

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