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Christ Sauveur

24 et 25 septembre 2022, églises du Sacré-Cœur et Sainte-Jeanne-d’Arc

Chers Frères et Sœurs,
Avant de commenter les lectures de ce jour, une précision s’impose.
Dans l’Évangile, il est question de fournaise, de torture… il ne manque plus que les
petits diables et les fourches pour avoir un beau dessin d’enfant à qui on a demandé
de dessiner l’enfer. Vous auriez demandé la même chose à un petit mésopotamien, il
vous aurait dessiné une citadelle sous la terre. Un grec vous aurait dessiné l’Hadès,
brumeux et marécageux. Mais un chrétien vous dessinera des flammes et des tortures.
Et cet Évangile n’y est évidemment pas pour rien.
Mais cet Évangile n’est pas une visite guidée de l’enfer. C’est une parabole, donc
une histoire faite avec des images qui sont des représentations culturelles de l’époque
du Christ. Jésus les utilise sciemment pour dire une réalité qui est spirituelle.
La limite de ces images est de nous renvoyer à des représentations matérielles pour
dire des réalités qui ne le sont pas. Ici, Jésus utilise l’image de la fournaise pour dire
la douleur de la séparation d’avec Dieu.
La douleur de la séparation d’avec Dieu dans la vie éternelle existera bel et bien.
C’est cet état de séparation qu’on appelle « enfer », et pas de devoir danser la salsa
du démon pour l’éternité.
Il ne vous a pas échappé que Jésus n’est pas venu nous enseigner, mais nous révéler.
Il ne nous donne ni de cours sur la Trinité, ni ne nous décrit une éternité probablement
indescriptible. Non, Jésus nous révèle une relation, une filiation entre Dieu et nous,
un amour qui nous sauve. Il nous révèle qui nous sommes et pourquoi nous sommes.

Ceci était dit, et avant de revenir sur la parabole de l’homme riche et de Lazare, jetons
un coup d’œil du côté du prophète Amos.
Amos s’énerve et prévient que si ça continue comme ça, « la bande des vautrés
n’existera plus ».
Les vautrés, ce sont les Israéliens qui ne regardent pas la situation en face : Israël est
en danger, les ennemis se pressent à l’extérieur et la société est décadente. Amos les

prévient : si vous restez bien au chaud dans votre confort, si vous pensez que votre
belle vie sera éternelle, l’ennemi Assyrien viendra vous écraser et « la bande des
vautrés » que vous êtes.
Et l’Assyrie a effectivement écrasé Israël. Ils auraient mieux fait d’écouter le
prophète Amos et de sortir de leur canapé.
Vous vous souvenez du Pape François qui disait exactement cela aux JMJ de
Cracovie. Comme le prophète Amos, il avertissait sur « la paralysie qui naît
lorsqu’on confond le bonheur avec un canapé (…). Nous ne sommes pas venus au
monde pour végéter, mais pour laisser une empreinte. Le temps qu’aujourd’hui nous
vivons n’a pas besoin de jeunes-canapés, mais de jeunes avec des chaussures, mieux,
avec des crampons, (…) sur le terrain, il n’y a pas de place pour les réservistes. Le
monde d’aujourd’hui vous demande d’être des protagonistes de l’histoire. »
Je crois que l’homme riche de l’Évangile est exactement cet homme-canapé que
dénonçaient Amos et le Pape François. Il est bien au chaud chez lui. Il n’est pas
forcément méchant ou mal intentionné… il vit simplement sa vie en profitant de ce
qu’il a. Et sans doute ne se rend-il même pas compte de la présence de Lazare devant
chez lui. Des pauvres, il y en a partout…
L’homme riche est simplement un gars qui possède et qui profite. Où est le mal ?
Et bien le mal se loge précisément dans la manière dont il est en relation. Je vous ai
dit que Jésus est venu nous révéler à nous-mêmes en nous révélant comment nous
sommes en relation. Ici encore c’est bien de cela qu’il s’agit.
Dans la vie éternelle, l’homme riche est séparé de Dieu et de Lazare par un grand
abîme. Mais durant sa vie, l’homme riche était déjà séparé de Dieu et de Lazare.
D’un point de vue des relations, la vie éternelle n’est que la continuité de la vie
terrestre. Le riche a construit sa vie en se séparant de Dieu et du prochain. C’est ainsi
que sera sa vie pour l’éternité : comme il l’a lui-même bâtie.
À une chose près : on n’emporte pas les choses qui passent dans la vie éternelle.
Donc l’homme riche qui a tout misé sur ce qui passe, n’a plus rien. Non seulement il
n’a pas de relation à Dieu, il ne l’a jamais eue, mais il n’a évidemment plus ses divans
ni ses somptueux banquets. Ne vous attachez pas aux choses qui passent, nous avertit
Jésus.
Alors l’homme riche a bien une excuse :
– Je ne savais pas, on ne m’avait pas prévenu.
– Je t’ai quand même donné Moïse et les prophètes ! lui répond Abraham.
– Oui, mais ce n’était pas assez, il fallait plus, plus de signes, plus de preuves.

Il lui fallait plus pour changer de vie, pour sortir de chez lui, pour voir Lazare, pour
en prendre soin.
Il fallait que Dieu en fasse plus pour le faire changer de vie… cet argument est
tellement actuel !
On a tellement de mal à laisser Dieu bouleverser nos manières de faire, de vivre.
Alors on se dit : si je tombais de cheval comme saint Paul, si j’avais des visions
comme Padre Pio, alors là oui, c’est sûr, moi aussi je serais un chrétien enflammé.
Sauf que Jésus nous répond : je suis déjà ressuscité d’entre les morts, que tu faut-il
de plus ? Tu n’auras rien de plus ! Maintenant, la balle est dans ton camp.
Voilà, frères et sœurs, à quoi Dieu renvoie l’homme riche qui réclame des signes
pour ses frères. Il lui dit, il nous dit : vous avez tout ! La balle est dans votre camp !
C’est maintenant le temps de sortir de vos canapés ! Les signes, les preuves, les
témoignages, vous les avez eus. Moi j’ai fait ma part. Si maintenant vous voulez
vivre pour la vie éternelle, à vous de vous bouger. Mais si vous êtes encore dans votre
canapé, c’est de votre responsabilité. Si vous avez besoin d’aide, demandez, vous
obtiendrez. Mais les signes, les témoignages de la résurrection, vous les avez. Si vous
ne les voyez pas, c’est que vous refusez de les voir.
Frères et sœurs, quand nous confondons bonheur et canapé́, bonheur et
consumérisme, notre relation avec Dieu et les autres (en premier les plus pauvres)
s’abime. Et c’est le début de ce que nous appelons l’enfer. C’est le début de l’abîme
qui s’installe entre nous et Dieu.
Alors bougeons-nous, mettons nos crampons, et rejoignons les Lazare de notre
temps. Parce que les relations que nous tissons ici-bas seront les fondamentaux de
notre vie éternelle.
Amen.

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